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ikofanu around the world
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19 avril 2005

Vox populi : la voix démocratisée...

"Vois sur ton chemin gamins oubliés, égarés,

donne leur la main pour les mener vers d'autres lendemains

Sonne au coeur de la nuit, l'onde d'espoir,

ardeur de la vie, sentier de gloire...

Bonheurs enfantins, trop vite oubliés, effacés,

une lumière dorée brille sans fin tout au bout du chemin." 

                      Les petits chanteurs de Saint-Marc

         Il faudrait se renseigner sur la capacité de tout-un-chacun à chanter correctement, c'est-à-dire à émettre des sons audibles par tous, en moyenne (je veux dire par une majorité de la population auditive concernée par le chant, en fait...) et si possible, de manière harmonieuse. J'entends alors par harmonie la capacité à percevoir suite à (ou sans) une expérience particulière gammes (à l'oreille ou en solfège), notes et tonalités (timbre de la voix).

Il m'est d'avis que ce "tout-un-chacun", justement, est entièrement capable, après auditionnement (pour ne pas dire conditionnement) de quelques séances devant jury compétent de, non pas développer, mais tout simplement faire émerger sa voix propre enfouie au tréfonds de sa propre gorge.

Preuve en est le résultat exceptionnel obtenu dans les chorales, où semble-t-il, aucune sélection n'est faite, si ce n'est celle qui définira l'octave, le timbre et le degré d'aptitude (c'est-à-dire le niveau de connaissance et d'émergence de sa voix propre) et une sélection psychologique face à l'abandon, le manque de volonté, la peur... naturelle, en somme.

Preuve en est aussi actuellement le succès incroyable des émissions grand public de variétés pour l'audition musicale (la diffusion, plutôt, mais soit), et depuis peu, pour son développement démocratique, d'où un apprentissage qui se veut désormais universel, par le biais de l'écran télévisé (hé oui!) et d'acteurs qui font partie du public télévisuel potentiel:

le peuple (encore faut-il bien différencier le public du peuple...).

Les starac' et Cie nous sont gré de ce fait d'apporter les arguments en faveur de la capacité naturelle des hommes à chanter, tous également, pas forcément en capacité lyrique, mais en tant que compétence humaine (basique mais non fondamentale) tel qu'on pourrait l'énoncer dans un dictionnaire.

Homme (Lat. hominis): [...] L'homme chante caractéristiquement et se différencie de l'animal, et notamment de l'oiseau, qui chante aussi mais caractéristiquement (comme un oiseau ; on parle d'ailleurs plus proprement de babillement, pépiement, gazouillis, jacassement... selon l'espèce.)

Bon à méditer quand on sait que bien des termes utilisés pour les oiseaux le sont aussi familièrement pour les hommes, ou du moins une certaine catégorie (bébés, bigotes,...).  

Donc, l'homme chante, et c'est là (son moindre défaut, cf. Les fables de Lafontaine) une caractéristique qui lui est propre, innée pourrait-on dire, en ce sens que le cri fut inné, par expérience de soi en contact avec autrui et l'universalité.

Ne pourrait-on pas alors définir tout simplement cette capacité à chanter par rapport à la capacité d'autrui? capacité d'audition plus que d'émission?

En effet, autrefois, tout le monde chantait, dans les champs, du matin au soir, et encore aujourd'hui dans les pays que nous définissons comme "en développement" (et puis les lendemains qui chantent...). Puis la radio, la télévision sont arrivés dans nos foyers et nous ont rendu muet. On écoute les autres parce que cette capacité s'est chargée d'un autre sens en perdant tout son sens, c'est-à-dire avec la fin de la transmission orale de la culture, par le chant et par le conte. Le chant est ainsi devenu un art, non plus une pratique populaire, un "art de vivre", une poétique, mais toujours plus vers un art de spécialiste, une pratique professionnelle. On écoute et on fredonne de manière solitaire, presque honteusement, considérant réellement que nous ne savons pas chanter, du moins à la mesure du professionnel.

Certains ont encore le sentiment presque "cendrillonesque" qu'ils savent chanter, et de telles émissions, on l'a remarqué notablement, ont permis l'éclatement au grand jour de toutes ces citrouilles, certes, mais ont aussi plus que maquillé la fonction première du chant, en ont complètement inversé le sens: On ne chante plus pour se donner du courage, tel ces marins qui criaient "hissez haut" pour avoir le vent en poupe ; on prend son courage à deux mains pour passer en public et s'affirmer en tant qu'homme, homme chantant s'entend, bien sûr (cf. le fou chantant de Charles Trenet), une des nouvelles facettes de l'homme redécouvert, mis à nu à nouveau, le nouvel homme, celui d'après le déluge, le nouvel Adam.

Mais quel déluge nous aurait terrassé pour nous revêtir de la sorte?

Et la résurgence des chorales, même après la fin du monopole religieux, le développement relatif des karaokés, l'explosion des académies artistiques ou tout simplement celui des flux du secteur musical tous horizons confondus (vente, Internet, écoutes, concerts) semblent redéfinir les contours du progrès humain, en réintégrant enfin le chant comme corde (vocale) à l'arc de l'homme moderne (ARGHH!).

Et en est-il de même de toutes les activités mises en avant par les spectacles télévisés grand public?

La danse, le jeu, la stratégie peuvent être en effet énoncés comme autant de qualifications naturelles de l'homme, permettant autant d'homogénéiser la condition humaine que de structurer les hommes, leur capacités relatives par rapport à ces composantes. On peut rappeler tout aussi bien que parmi les animaux, les abeilles dansent aussi, caractéristiquement, en tant qu'elles émettent ainsi un ensemble de signaux correspondant à un langage. Ce n'est pas, ou plus le cas de l'homme aujourd'hui. De même pour le jeu, on trouverait les arguments pour différencier toujours plus l'homme de l'animal. (cf. Gaston Kelman, je suis noir mais je ne mange pas de manioc).

A quel homme en sommes-nous donc arrivés?

On pourrait encore penser que l'on chante, que l'on danse aujourd'hui pour le chant et la danse eux-mêmes, mais, on l'a bien compris, c'est plutôt pour l'affirmation de soi, par narcissisme. Désormais le chant ne se suffit plus et il faut non seulement savoir chanter, mais aussi une chorégraphie, une mise en scène, une théâtralisation nécessaire à la spectacularisation au détriment du chant, et de fait, de toutes les composantes de cette mascarade pour que l'ensemble paraisse harmonieux, homogène, pour privilégier le paraître, principal atout télévisuel, facteur du "passe-bien-à-la-télévision". C'est cette perte d'identité et de véritabilité, pourrait-on dire, des capacités humaines qui entraîne également une perte de spontanéité, laquelle est encore présente dans l'enfance (innocence) ; ceci préfigurant peut-être notre rapport actuel au Temps, éphémère et circulant, fluide en fait.

Avec l'aimable collaboration de mes collègues du Louvre, penseurs émérites s'il en faut, en potentiel du moins, pourvu qu'on les intéresse à la question, qu'on les englobe dans le phénomène, qu'on les responsabilise et les concerne, qu'on les rende libres de leurs idées et de leurs moyens, qu'on les politise finalement.

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  • La pensée libre. Un autre regard sur le monde et sur soi-même, et pas des plus conventionnels : il faut aller soi-même devant les évènements et ne pas attendre leur médiatisation. Ma philosophie: l'information par le peuple.
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